Maragha, Iran, vers 1315
« A voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? »
(Psaume 8, 4-5)
ENTRÉE
Au XIVe s., Houlagou Khan, le petit-fils de Gengis Khan, fait construire à Maragha, dans l’Iran actuel, un observatoire d’une grande précision dont il confie la direction à Nasir At-Tusi. A cette époque, et jusqu’à Copernic, c’est toujours L’Almageste, le livre de Ptolémée écrit en 138 après JC, qui sert de référence : la terre est au centre de l’univers et les étoiles se déplacent sur la voûte du firmament. Nasir At-Tusi se contente de corriger les mesures de Ptolémée. Cette sphère céleste a été réalisée dans le cadre de l’observatoire de Maragha.
LECTURE DE L’OEUVRE
Ce magnifique objet est le fruit d’un travail technologique impressionnant en relation aux moyens de l’époque : la cartographie du ciel est d’une précision qui nous surprend encore aujourd’hui. Sur la voûte céleste, nous admirons les dessins des diverses constellations. Elles sont un moyen simple de s’orienter quand on regarde le ciel, mais à la différence du XIVe s., nous savons qu’elles ne correspondent pas à une réalité matérielle. Elles sont juste un effet visuel encore utile dans les planétariums modernes. L’homme contemporain a conscience de l’infini des espaces intersidéraux et la représentation de l’univers centrée sur la terre, telle qu’on la pensait avant Copernic, nous semble bien archaïque.
Les religions abrahamiques (judaïsme, christianisme et islam) présentent l’être humain comme sommet de la création divine. N’y a-t-il pas une contradiction avec sa place réelle, poussière perdue dans l’immensité de l’univers ? Certes non, puisque ces récits des commencements de la création (Genèse) sont des méditations poétiques où l’homme croyant exprime un émerveillement : comment se fait-il que Dieu, le tout-autre, celui dont tout dépend, s’intéresse à cette petite chose qu’est l’homme, au point de lui offrir son amour ?
ECHO SPIRITUEL
Dieu n’est pas dans les étoiles et il ne se rencontre pas au terme d’une démonstration scientifique. C’est notre capacité d’aimer qui nous rend capable de l’accueillir et de vivre avec lui. Là est notre grandeur véritable, et elle nous vient de lui.
La puissance technologique et scientifique risque la folie quand l’homme devient son propre dieu. Elle est alors soumise aux forces violentes des conflits d’intérêt, instrumentalisée par les plus puissants, risquant même de s’autodétruire. Ne sentons-nous pas un appel à l’orienter au service de quelque chose de plus grand que notre unique pouvoir ? Si nous nous ouvrons à cette Parole qui nous vient de Dieu, alors nous accueillerons une force immatérielle et pourtant plus puissante que tout : l’amour, force transformatrice et pacificatrice de l’univers. Et cela commence par mon petit univers quotidien, quand je cesse de m’en considérer le centre absolu.