Falconet, 1757
« Mon bien-aimé a parlé ; il m’a dit : « Lève-toi, mon amie, viens, ma toute belle. » »
(Cantique des cantiques 2,10)
ENTRÉE
Étienne Maurice Falconet n’est pas un artiste de la frivolité. Grand intellectuel, ami de Diderot, il réfléchit sur le sens de son art, au service de la beauté. Pour lui, le beau n’est pas dans un idéal abstrait. Cependant, il ne s’agit pas simplement d’imiter la chair, mais d’exprimer la vie. La beauté est dans le souffle vivifiant qui anime la création.
LECTURE DE L’OEUVRE
La statue représente une toute-jeune femme, qui entreprend de descendre dans l’eau. En maintenant le haut du corps en arrière, la main gauche appuyée sur un support, elle se tient en équilibre sur sa jambe droite pour avancer doucement le pied gauche et tester la température du bain. Il ne nous est pas difficile de réveiller en nous les impressions évoquées par cette situation. L’artiste a parfaitement saisi cet instant, et la pureté de la composition nous y emmène immédiatement, sans effort.
La grâce de la pose, la concentration du visage, les yeux baissés, tout cela maintient une distance avec le spectateur et une pudeur qui permet à la nudité de nous emmener plus profondément dans notre méditation.
La jeune femme est prête à lâcher son drap, mais n’ose pas encore s’abandonner totalement. Pour celle qui n’est qu’au seuil de sa vie de femme, s’exposer nue ne peut être un événement anodin. L’émoi du bain devient alors la métaphore d’une autre émotion dont on peut imaginer qu’elle trouble cette jeune femme : l’appel de l’amour. Promesse d’un délicieux abandon, il demande cependant de franchir la barrière de la peur : peur d’être sans défense, abîmée, possédée, jugée.
ECHO SPIRITUEL
L’amour naissant est une force qui me pousse à oser franchir l’obstacle et à sortir de moi-même pour m’offrir. Je m’éveille alors à l’étrangeté de notre destinée humaine : pour me trouver, il faut que j’accepte de me donner. J’existe pour aimer, mais ce chemin est celui d’un plongeon dans l’inconnu qui doit mobiliser toutes les forces de confiance en moi. Voilà ce dont Jésus veut me rendre à nouveau capable, jusqu’à se révéler comme l’époux, qui appelle l’Église, humanité réconciliée, à vivre de son amour.
Dans toutes les relations humaines, puis-je m’ouvrir à la Parole qui, au-delà de toutes les voix entendues, me convie à sortir à la rencontre de celui qui m’aime plus que tout ce qui est imaginable ? Ce Dieu amoureux attend ma réponse d’amour et m’offre de vivre de sa vie. Il m’invite à l’aimer à travers les autres hommes et femmes qu’il met sur ma route.
Et si cette « baigneuse » touchait mon désir profond de vivre, c’est à dire d’aimer et d’être aimé ? Mon baptême est lui aussi une plongée, dans la miséricorde divine.